Dima Abdallah
2022 – éditions Sabine Wespieser – 20 euros
Bleu est le gouffre sans fond
Bleues sont les pluies acides qui me brûlent
Bleu est mon sang empoisonné
Bleues sont les cendres qui coulent dans mes veines
Bleu est le tourbillon
Bleu est le vertige
Il vit seul dans son appartement, oublié de tous, quand il apprend la mort de son unique amour. Il quitte alors son antre et décide de s’installer dans la rue où les rencontres vont se multiplier et lui rappeler ce que sa mémoire cherchait à oublier. Au fil des souvenirs, le narrateur nous emporte dans son histoire tissée de regrets qu’il tente de dissoudre dans l’alcool et la drogue. Au plus près du bitume, accompagné par la lumineuse Minuit, il chemine dans les méandres de sa mémoire et remonte à son enfance saccagée par la fureur des hommes.
J’entends tous les jours
cette voix qui hurlait…
Comme dans son premier opus Mauvaises herbes, l’écriture sensible et poétique de Dima Abdallah se délie au fur et à mesure que le destin de cet homme s’accomplit. Arrimé au XXème arrondissement de Paris, il tente de résister à la tornade qui le guette à chaque coin de rue, à chaque regard échangé, à chaque odeur qui le tire vers un passé qu’il ne peut plus ignorer. Les digues de protection se rompent les unes après les autre et c’est alors un tourbillon de mots, de sensations, d’images qui le submergent. L’armure se fendille, le corps se fond dans l’asphalte, s’oublie jusqu’à ce voyage rêvé vers l’autre rive, vers les siens, vers les femmes qu’il a aimées. Un roman puissant, hypnothique aussi noir que lumineux.