Deux rencontres-lectures en présence de
FALMARÈS
Vendredi 19 avril à 19h aux Déferlantes – Morlaix
Claude FAVRE
Samedi 20 avril à 19h aux Métamorphoses – Douarnenez
Falmarès est l’une des plus jeunes voix de la poésie guinéenne. Dans son parcours – son exil – sinueux, il ne cesse d’écrire. Ses premiers recueils ont été publiés en France par les éditions Les Mandarines : Soulagements (2018), Soulagements 2 (2020) et Lettres griotiques (2021). Puis par les éditions Yigui : Syli ô Guinée (2023). Qualifié de « Réfugié poétique », il dit n’écrire pas seulement pour lui mais pour celles et ceux qui ont vécu et continuent de vivre une histoire semblable à la sienne. Sa poésie se fait ainsi intime autant qu’universelle.
Catalogue d’un exilé est son dernier recueil préfacé par le poète tchadien Nimrod. Écrit entre 2019 et 2023, il réunit une centaine de poèmes de formes brèves teintée de lyrisme et présentée par Falmarès comme un « outil d’apprentissage, un moyen de résistance, un moyen de survie » (p.27). Son histoire est celle d’une mémoire vive permanente qui lui a donné la force de traverser les pays et de rejoindre l’ouest de la France, sa terre d’accueil. Il convoque régulièrement ses souvenirs d’enfance et son héritage familial auquel appartiennent les griots. Son héritage est aussi celui des poètes à qui il rend hommage : Senghor, Césaire, Rimbaud, et tant d’autres. Il apprivoise le présent, la vie qui malgré tout continue, en poésie toujours.
Cette odyssée « falmarésienne » pleine d’espoir contient une vraie musicalité. Falmarès se « déclame être lyre » (p.230). Nous l’entendrons au rythme de cette rencontre grâce à plusieurs lectures de poèmes.
« Carte d’identité
Je ne suis ni guinéen ni africain
Je ne suis ni français ni américain
Ni d’aucune autre nationalité.
Poète je suis,
La littérature est ma patrie
La poésie, ma langue nationale. »
(p.69 Catalogue d’un exilé, éd. Flammarion)
Crédit photographique : Marie Dos Santos-Barra
Claude Favre est poète, performeuse. Elle a collaboré aux Cahiers critiques de poésie du Centre international de poésie de Marseille (CipM), elle est publiée par des maisons d’édition indépendantes et dans des revues telles que Attaques (éd. Presses du réel, collection Al Dante). Ses deux derniers textes Thermos fêlé et Alep, quinze heures du matin sont au cœur de ces rencontres. Sa langue, dite de guingois, se joue de la syntaxe et s’invente parfois par accidents.
Alep, quinze heures du matin
C’est un chant d’amour pour Alep, pour celles et ceux dont les enfants ne connaissent que la guerre. Claude Favre ouvre grands les yeux, les oreilles, la bouche pour ne pas se [nous] laisser happer par le cours de la vie. Des mots, des images, il y en a beaucoup. Ils se répètent, on s’en méfie, ils paraissent insuffisants ou débordent. Des voix fantômes se font entendre : « ne me laisse pas tomber » comme pour empêcher l’horreur de recommencer. La langue tient, tente de nommer, de dire que « cela pourrait s’appeler la vie » (p.11), comme une prophétie : il y a, il y aura.
Thermos fêlé
Un journal-poème écrit au cœur de l’hiver dédié aux victimes des politiques sociales. C’est aussi une adresse à celles et ceux qui observent, témoins démunis ou indifférents, cette réalité vacillante (attentat, guerre, racisme…). Claude Favre appelle à se ressaisir des mots sans « périphrases hypocrites » (p.36) et convoque d’autres poètes. Le texte se vide de tout superflu, disparition de la ponctuation et de certains mots, collages, sans que cela en affecte le sens. Il va à l’essentiel, il va à l’urgence.
« dis, moi, mais dis-moi écarte les peurs, que le chemin soit de traverses, à vivre pas de droit chemin à nulle surprise, dis-moi mais dis-moi, parle-moi, traverse ma bouche traversée de
bouches »
(p.73, Alep, quinze heures du matin, éd. Les Presses du réel)
« il faudrait faire joie des mots, troubler mieux le langage pour décoller l’œil du guidon, agrandir l’horizon pour, contre chacun sur son quant-à-soi (…) »
(p.31. Thermos fêlé, éd. L’Herbe qui tremble)
Crédit photographique : Jean-Marc de Samie